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18 mars 2009 3 18 /03 /mars /2009 09:42

Parlons de luxe. Je sais que tu es curieux, lecteur, de connaitre l’univers dans lequel mon métier me fait évoluer. Je vais donc te parler de ses strass, de ses paillettes, de ses moulures et de ses draperies de fils d’or. Mais afin de ne pas te faire passer trop rapidement de ton morne quotidien à l’univers chatoyant de nos amis les riches, ce qui pourrait t’occasionner une syncope (voir une Mickael Vendettaïsation), évoquons d’abord le luxe par un domaine qui t’es vaguement familier. Laisse-moi donc de conter…les chiottes du Westin.

 

Pour tous les non-possesseurs de Rolex dont les vies ne sont qu’un océan de banalité looseristique (travail, famille, courses le samedi…), je rappelle que le Westin est ce grand hôtel parisien situé non loin de la place Vendôme, à l’angle de la rue Castiglionne et du boulevard de Rivoli. Il m’est régulièrement donné de me rendre dans ce grand Formule 1 amélioré à l’occasion de salons ou de conférences où petits-fours et caféine réapparaissent à volonté (un peu comme dans Harry Potter…)

 

Parlons des toilettes, donc. Comme toi, comme moi, comme tout le monde, les riches ont régulièrement des besoins pressants, qui les poussent à se rendre aux WC. Ceux du Westin se trouvent face au bucolique Jardin d’Hiver. L’on accède aux toilettes via un vestibule dont la moquette s’avère épaisse comme une liasse de billet, étouffant ainsi les bruit de pas (oui, le riche n’aime pas que l’on sache qu’il va faire caca). Là où un banal trois étoiles indiquent les toilettes femme et homme par un simple symbole schématique des deux sexes, le Westin va plus loin. Sur les deux portes trouve-t-on ainsi deux portraits calligraphiés soigneusement encadrés, représentant un gentilhomme et une gente dame apprêtés comme aux dernières heures du XIXe siècle.

 

Le riche pousse alors la porte destinée à son sexe (il s’agit là d’une image, encore que durant certaines soirées partouzatoires de la capitale, on rapporte que quelques barbons alcoolisés et autres animateurs télévisés auraient déjà déshonorés quelques serrures Louis XVI) et arrive dans un espace avoisinant les 30 m², tout tapissé de marbre et de boiserie. En musique, car les latrines sont délicatement nappées d’une musique jazzy invitant au recueillement défécatoire. A gauche, on trouve comme n’importe où les fameuses pissotières, accompagnées de solides plaques de marbre noir pour préserver l’intimité de leurs utilisateurs. Ici, pas de boules désodorisantes au fond du récipient, Chanel ayant refusé d’en produire pour embaumer cet espace singulier. A droite se tiennent les cabines, où le passant fortuné posera son séant avec de recourir au papier toilette sept épaisseurs de l’hôtel, dont les dérouleurs plaqué or sont surmontés d’un mot du directeur : « Il nous est impossible de vous proposer le papier toilettes Louis Vuitton précédemment octroyer ici, la maison en ayant cessée sa production » *.

 

Contrarié par cette annonce, le visiteur sort de la cabine et se rend aux lavabos, marbrés eux-aussi, installés de part et d’autre de la pièce. Après avoir mouillé ses mains en actionnant les rutilants robinets argentés, il se oint les mains avec le savon Thierry Mugler accroché au mur (vous ne croyiez tout de même pas qu’ils allaient mettre du « Le Chat » comme chez les gueux de province, non !). Après s’être abondamment rincé les mains, le fortuné visiteur se les essuie grâce à des serviettes épaisses comme des nappes, empilées au millimètre prêt au bord de l’écuelle nacré. Satisfait, il se redresse et toise alors les reflets de son crâne dégarni dans un miroir dont l’ampleur dépasse celle du pare-brise d’un monospace. S’adressant à lui-même un signe de satisfaction, l’homme pousse alors la porte par laquelle il est rentré.

 

A l’extérieur, une femme voutée d’une cinquantaine d’années passe l’aspirateur sur l’épaisse moquette du vestibule. « Bonjour » lui adresse alors l’homme en traversant la pièce sur un bruit de pas étouffés. La femme sursaute, et regarde, les yeux ronds, le passant encravaté qui la fixe, la bouche et le regard souriant. Elle rend le bonjour d’une voix voilée par l’âge et la cigarette. Un acte dont elle est peu coutumière tant les bonjours lui sont rarement adressés. Cette surprise pèse dans sa réponse, comme pour souligner à l’homme à quel point il est inconvenant pour un client de saluer le petit personnel. Gêné, l’homme disparait, emportant sa démarche silencieuse dans le couloir voisin. La femme baisse alors la tête, et se remet à frotter assidument la moquette épaisse telle une liasse de billet dont, elle, ne verra sans doute jamais la couleur.


La prochaine fois, je vous initierais à la Haute Couture en commencant par "La boutique Tektonik (TCK) de Chatelet".


 * : j'exagère, naturellement, mais il m'a tout de même été donné de voir voir à Londres un papier toilette orné de fins liserets d'or rappelant les motifs Burberry. Comme quoi, se torcher bling-bling, c'est possible.

 Classique, mais ça colle bien.
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commentaires

L
"vous ne croyiez tout de même pas qu’ils allaient mettre du « Le Chat » comme chez les gueux de province, non"eh.. mais c'est le savon qu'on a dans les chiottes de la DDX Company!!signé : Dame Pipi bureau du fond à droite
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S
J'adore!!!!!!!!viens sur mon blog me dire ce que tu en penses.
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M
J’ai visité votre blog, bravo.Marcello http://haarg.over-blog.com
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V
histoire très originale ... Eh bien, tout à fait ...
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S
J'aime le fait de se torcher blingbling xptdr
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